La gestion de conflits

Les relations avec les parents peuvent être sources d’angoisse pour nombre de collègues notamment car une minorité d’entre elles peuvent être conflictuelles. Même si on nous répète souvent qu’il n’y a pas de recette miracle, voici, un peu en vrac, des éléments que j’utilise au quotidien. Si cela peut servir.

Lors d’une réunion, équipe éducative, rencontre avec un parent, il me semble important de toujours laisser la parole au parent en premier pour qu’il puisse évacuer tout ce qu’il a à dire.
Pendant cette prise de parole, essayez de l’interrompre le moins possible même si les choses dites vous font bondir, vous reviendrez dessus après. Vous pouvez ainsi préparer vos arguments dans votre tête en attendant.
Si votre interlocuteur, vous pose une question qui mérite une réponse longue et étayée mais que vous voyez bien qu’il a encore plein de choses à déverser, faites une réponse générale et différez votre réponse (« Je compléterai après plus en détail, je vous laisse finir »).

Quand un parent arrive énervé à la grille, plusieurs possibilités :

  • différer la réception du parent mais en lui proposant de suite des possibilités de rendez-vous. « Nous ne pouvons malheureusement pas vous recevoir tout de suite, mais il semble important que nous prenions un temps posément pour échanger autour de cette situation. Quelles sont vos possibilités de rendez-vous ? » ( Le « nous » laisse dès le départ entendre que l’enseignant peut être avec un autre enseignant, la directrice… )
  • recevoir le parent de suite si cela est possible, assis, dans une salle avec ou sans collègue selon comment vous sentez la situation. Proposez au parent, d’entrer et de s’installer. « Venez, on va s’installer tranquillement. Ce que vous me dites mérite qu’on prenne le temps d’échanger. »

Mais la situation ne doit pas se régler à la grille, ni devant des enfants ou des parents. De même, debout dans la salle de classe, n’est pas une position idéale.
Quand le parent arrive avec vous dans la salle où se tiendra la réunion, faites le asseoir et prenez le temps devant lui d’aller chercher des feuilles et des stylos.
Ce petit temps permet de faire baisser un peu la tension. Et pendant que le parent s’exprime, prenez quelques notes. Ne passez pas non plus votre temps à noter car il faut essayer de garder le contact visuel avec son interlocuteur. Mais noter une phrase, quelques mots en n’hésitant pas à souligner plusieurs fois le ou les mots qui semblent importants pour le parent. Car il voit que vous notez et regardera ce que vous avez écrit. Sans que vous n’ayez encore rien dit, il remarquera que vous avez entendu son problème (ce n’est pas pour autant que vous serez d’accord avec lui).

Si l’enfant du parent est présent, il peut assister à une partie de la rencontre pour expliquer ce qu’il ressent, son problème. Toutefois, il ne faut pas hésiter à le confier à un collègue pour la suite de la réunion. Tout ce qui est dit entre adultes n’a pas à être entendu par l’enfant.

Les échanges non verbaux sont aussi importants. Il faut donc essayer de remarquer les signes d’énervement, d’incompréhension, de contrariété, de peine chez votre interlocuteur quand vous parlerez afin de pouvoir reprendre votre propos en le reformulant…

Avoir une boite de mouchoirs dans la salle de réunion. Il arrive qu’un parent pleure. Ce n’est ni un objectif, ni forcément positif ni forcément négatif. Ce peut être le relâchement de la tension exprimée précédemment (et donc plutôt positif), l’expression d’une situation douloureuse, ou encore la prise de conscience d’une problématique particulière (faire le deuil de l’enfant idéal fantasmé par chacun). Donner le mouchoir montre que vous prenez en compte la difficulté de la personne en face de vous. Pleurer devant quelqu’un n’est pas facile.

Réussir à garder son sang froid. Ne pas crier plus fort que la parent ou s’énerver plus que lui. Comme avec les élèves, essayer (ce n’est pas toujours facile) de garder un débit de parole modéré et un volume posé. Sinon vous irez droit dans une impasse.
De la même manière ne pas avancer de manière brutale les arguments mais essayer d’y aller progressivement, d’avancer pas à pas pour permettre aussi à votre interlocuteur de cheminer vers où vous voulez le mener. Sinon il risque de se braquer.

L’humour et l’auto-dérision sont aussi deux outils utiles qui peuvent aider à dédramatiser. À utiliser toutefois à bon escient, il ne faut pas que votre interlocuteur ait l’impression que vous vous moquez de lui ou que vous ne prenez pas au sérieux la situation.

Il peut arriver dans des cas rares que certains parents aient besoin d’être un peu « secoués » et qu’on leur parle de manière un peu plus directive. Cette situation doit être pleinement calculée et prévue et ne doit pas durer dans la conversation. Le but est juste de faire un électrochoc pour permettre ensuite de poursuivre la suite de la conversation de manière posée.

Si malgré tout cela, l’échange n’est pas possible, ne pas hésiter à clôturer la réunion mais en ne fermant pas la porte à un futur échange. « Nous n’arrivons pas à avoir un échange constructif. Arrêtons pour aujourd’hui la réunion. Toutefois, il est essentiel qu’on puisse se rencontrer de nouveau rapidement pour trouver ensemble une solution. »

J’utilise par exemple, régulièrement certaines phrases dans mes discussions :

  • Je comprends ce que vous me dites…
  • En tant que parent, vous ressentez
  • Ce que vous me dites est important
  • J’entends votre propos
  • Merci de m’informer de cette situation

  • Suivi généralement d’un « mais » et j’avance ensuite les arguments de l’école.

Cette étape de restitution ultérieure est aussi à mon sens fondamentale. Évidemment, elle ne concerne pas toutes les situations mais il parait opportun de prendre quelques instants (un coup de téléphone, un mail…) pour faire un point l’évolution des événements. Si personne n’a rien observé de particulier, l’idée n’est pas de se positionner sur « Nous n’avons rien vu, je vous l’avais bien dit qu’il n’y a rien du tout que votre enfant raconte n’importe quoi. » mais plutôt sur « Pour le moment, nous n’avons rien observé de particulier, nous continuerons à être vigilent. N’hésitez pas à revenir vers moi si votre enfant vous relate d’autres problématiques ».

Le positionnement qui laisse toujours la porte ouverte, qui montre que l’enseignant est à l’écoute, fait preuve d’empathie aide à instaurer une relation de confiance entre les familles et l’enseignant.
Je suis persuadé qu’ainsi bon nombre de conflits peuvent être évités.
Évidemment, vous pensez tout de suite au parent qui va se sentir tellement à l’écoute qu’il va venir tous les jours pour n’importe quel prétexte et qui va essayer d’envahir l’espace des enseignants.
Comme avec les enfants, différenciation 😉 Un peu de fermeté fait souvent l’affaire « Vous êtes déjà venu trois (quatre, cinq, six) fois pour ce problème depuis le début de la semaine, nous nous en occupons, je ne veux plus vous voir pour cette problématique. Je vous rappellerai pour vous tenir informé. »

Cette prise de conscience du point de vue du parent ne doit pas être confondu avec une faveur, un privilège qui lui serait fait. Pour éviter ce risque, il peut être utile de se référer durant les échanges au cadre institutionnel (loi, code de l’éducation, programmes, règlement de l’école…).

Malgré tout, il arrive malheureusement qu’un parent soit et reste très véhément voire menaçant et agressif. Dans ce cas là, il est essentiel de prévenir votre hiérarchie et de faire une remontée d’incident. Je ne peux que vous conseiller également d’avoir une assurance professionnelle comme l’Autonome de solidarité.

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